dimanche 15 juillet 2012

Leonardo: le dernier voyage du Mandeville - Tome 2 - de Matthieu Legault

Leonardo: le dernier voyage du mandeville - Tome 2, Matthieu Legault, Les éditeurs réunis, 2011, 256p, ISBN: 978-2-89585-090-8

Quatrième de couverture
Après l’incendie qui a ravagé l’atelier du grand maître Verrocchio, la vie reprend tranquillement son cours normal à Florence, la capitale des arts.

Les tensions entre Botticelli et Leonardo se sont calmées, mais les deux garçons ne s’entendent toujours pas, au grand désespoir de leur maître. Ce dernier les envoie en mission vers la Chine dans l’espoir de créer un rapprochement entre les deux artistes.

Accompagnés de Vito et Vera, les amis de Leonardo, les apprentis embarquent sur le Mandeville pour un voyage en mer riche en émotions et en aventures. Avec les autres à bord, Leonardo devra affronter des navires ennemis, braver une tempête infernale et libérer un des siens séquestré par des pirates mal­veillants… Le jeune génie arrivera-t-il – avec quelques inventions extraordinaires et son sens de la stratégie hors pair – à gagner l’Extrême-Orient sans y laisser sa peau? 





Voyage dans l'imaginaire
 Lors de mon billet sur le premier tome, je disais ceci :
Il y a de ces romans qui font voyager par-delà les mers, par-delà les montagnes, si loin que l'aventure devient le moteur même de l'histoire. La transcendance des mots amène un monde de liberté et de terres sauvages si différent du nôtre qu'on accepte le périple textuel avec plaisir. On ne sait jamais qui on rencontrera au détour d'un chemin : flibustier, sorcière, chevalier, saltimbanque, créature elfique, monstre... Leonardo: l'atelier du grand Verrocchio est un livre de ce type. Grâce à ce récit, j'ai été transporté de ma chambre vers la première Renaissance italienne, au milieu des humanistes et des inventeurs, des grands peintres et des explorateurs. J'y ai rencontré Léonard de Vinci, Sandro Botticelli, Le Verrocchio, Laurent de Médicis et, même, Christophe Colomb.
Cette capacité à créer du rêve parsème encore plus l'imaginaire du deuxième tome de Leonardo. En lisant ce roman, je me suis retrouvée sur une caravelle commerciale, parmi des marins passionnés par les sept mers, en direction de la Chine de jadis. J'ai porté des étoffes aux riches tissus en compagnie de Leonardo. J'ai senti l'odeur du sel et des grands vents maritimes en prenant le soleil sur le pont. Je me suis laissée bercer par le bruits des vagues, jusqu'à atteindre un état de grande paix. J'ai craint tempêtes et pirates avec une angoisse réelle. J'ai même eu le vertige à cause du bateau qui tanguait sans cesse! Tout cela, je le dois à la plume de Matthieu Legault, qui transmet avec une grande sensibilité les sens et les images propres à un tel récit. Grâce à une rigueur historique qui reflète une forte passion de la part de l'auteur, la projection devient aussi aisée que la lecture. Mais l'imagination ne demeure pas en reste pour autant : des personnages atypiques et des technologies anticipées rappelle le caractère fictif de cette œuvre. Une tentative qui pourrait être fâcheuse si elle était maladroite. Or, il n'en est rien. Tout est maîtrisé d'une main de maître, ou plutôt, de mots d'écrivain. Le recours à des références tant historiques que littéraires (La divine comédie de Dante, par exemple) donne une profondeur ainsi qu'une qualité inestimables à l'ouvrage. Encore une fois, nous sommes plongés dans un roman jeunesse d'une haute valeur, tout-à-fait du même niveau que les romans pour adultes. Je n'y trouve rien de négatif. Je suis même entrée dans l'histoire du premier coup cette fois-ci, contrairement à ma lecture du tome 1. Bref, vous aurez compris que je recommande cette série et ce tome à tout ceux qui ont envie de s'évader dans leur propre imaginaire en compagnie des grands esprits de la Renaissance : Leonardo Da Vinci, Sandro Botticelli et Christophe Colomb, ainsi que tous leurs amis-es à la personnalité si attachante.

Extrait

lundi 9 juillet 2012

Moïse : l'affaire Roch Thériault - par Mario Azzopardi

Fiche technique
Savage Messiah / Moise : l'affaire Roch Theriault
Réalisé par Mario Azzopardi
Nationalité : québécoise 
Date de sortie : 2002
Société de production : Christal Films
Avec Polly Walker, Luc Picard,  Isabelle Blais, Isabelle Cyr, Julie LaRochelle et Pascale Montpetit.

Synopsis (source)
Inspiré d'un fait vécu. Roch Thériault (Luc Picard), le chef d'une étrange commune, vivait avec ses 8 femmes et ses 26 enfants. Une travailleuse sociale (Polly Walker) devine, malgré les apparences trompeuses, le désespoir des femmes de Thériault lors d'une visite de la commune. Malgré l'indifférence de ses collègues de travail, elle entreprend une enquête qui mène à de terribles découvertes; un enfant mort, d'étranges rituels ainsi que de graves cas de violence physique et psychologique. Se faisant, elle met sa carrière et sa vie en jeu. Elle est toutefois prête à surmonter tous les obstacles pour libérer de l'emprise de Thériault les membres de cette étrange communauté. Elle doit également affronter Thériault qui manipule avec une étonnante facilité les gens et le système, y compris les enquêteurs nommés par le tribunal.
  
Mon appréciation
Roch Thériault, dit Moïse, n'est plus à présenter. Un des plus dangereux criminels au Canada (en tête de liste avec les tueurs en série!), fondateur d'une des pires sectes de l'Amérique du Nord, son histoire va longtemps continuer de faire jaser. Comme disait l'une de mes anciennes prof de philo : « pour connaître les critères d'une secte, il suffit de regarder celle de Thériault : elle les a tous à sa liste, atrocités comprises ». Vous m'excuserez donc si ce billet révèle quelque peu le film, mais cette histoire est si connue que je ne crois pas vendre beaucoup d'éléments de l'intrigue.

Moïse : l'affaire Roch Thériault, c'est donc la troublante histoire de la secte fondée par Roch Thériault, la prétendue réincarnation de Moïse, après son établissement en Ontario. La partie concernant le Québec n'est donc pas présente dans le film, qui se concentre sur les dernières années de la communauté.

Le drame
Lentement, mais sûrement, le film retrace les atrocités commises par Thériault sur ses huit concubines et leur ribambelle d'enfants dans sa communauté autarcique : violences psychologiques et physiques, faim, travail forcé, humiliations, abus sexuels, incestes, tortures, esclavage, amputations, meurtre... Lentement, la tension monte et l'horreur se dévoile au grand jour, sous nos yeux. Et lorsqu'on respire enfin, devant la fin d'une abomination, c'est pour mieux retenir son souffle devant la révélation d'une nouvelle. Je crois que la grande force de ce film, c'est cette capacité à produire une horreur si crédible, perpétrée au nom de la vision égocentrique de l'amour du Messie sauvage. Impossible de fermer les yeux en se disant que ce n'est que fiction, car l'histoire est vraie. Et plus que troublante.

Le Messie sauvage
Le meilleur point du film, c'est cette magistrale interprétation de Luc Picard dans la peau de Rock, Moïse, Thériault. Intense et cruel à souhait. Difficile de croire qu'un acteur réputé si gentil se cache derrière ce personnage mauvais et manipulateur. Avec ce genre de rôle, le risque, c'est de surjouer. Faire de gros yeux méchants-méchants à tout bout de champ pour dire que le monsieur est méchant-méchant. Or, l'interprétation de Picard est juste et maîtrisé. Les regards de mépris lancés par celui que l'on surnomme parfois le Charles Manson canadien sont crédibles et lancés au bon moment et à la bonne personne. En fait, Luc Picard réussit à dégager un véritable sentiment de violence et de folie qui crée une peur réelle. Un acteur prodigieux et un grand rôle.

La réalisation
Par contre, un bémol constant me dérange dans ce film : sa réalisation. En effet, celle-ci vieillit mal. Je pense que le réalisateur n'a pas voulu dépasser le vulgaire stade « série télé-fait vécu ». Du coup, le film n'est qu'une série de plans fixes, avec très peu de mouvements de caméra, d'insertions d'images douteuses et même de couleurs fades. Son petit budget s'adaptait pourtant très bien à ce style d'histoire. Dommage, car ce film avait un bon petit potentiel indépendant. Du coup, c'est vraiment pour le scénario qu'il faut regarder Moïse : l'affaire Roch Theriault, et non pour la technique.

Le test de bechdel
J'ai soumis ce film au test de bechdel. Voici les résultats :

Y a-t-il au moins deux personnages féminins dans le film, avec un nom? : Oui, et une douzaine de femmes à part de cela!
Qui parlent l'une avec l'autre? : Oui, et ce, à plusieurs reprises.
Au sujet d’autre chose qu’un homme ? : C'est là que le bât blesse. La majorité des conversations tournent soit autour de leurs anciennes aventures de couchette, soit du personnage de Moïse. Ces femmes peuvent parler durant 5 secondes de leurs émotions propres, mais l'associent aussitôt à Roch Thériault ou à l'ex mari de la travailleuse sociale.
Ces femmes, avec un prénom et qui entretiennent la conversation, parlent-elle d'autre chose que des hommes durant au moins une minute? : Donc, elle parle d'autre chose que d'un homme, mais pas durant plus de 10 secondes dans tout le film. Le film échoue donc le test, malgré sa distribution presque entièrement féminine. Et c'est dommage. Le film aurait eu plus de profondeur si les personnages féminins auraient hérités d'une personnalité propre.
 
En conclusion, Moïse : l'affaire Roch Thériault, un film poignant sur une tragédie humaine qui aura bouleversé le Canada.

Un extrait du film
http://www.addik.tv/cinema/moiselaffairerochtheriault/